THÈME
DE L’ARTICLE :
L’importance des
cercles scientifiques à la lumière de La
Formation de l’esprit scientifique de Gaston Bachelard.
ÉPIGRAPHE :
« Quand
il se présente à la culture scientifique, l’esprit n’est jamais jeune. Il est
même très vieux, car il a l’âge de ses préjugés. Accéder à la science, c’est
spirituellement rajeunir, c’est accepter une mutation brusque qui doit
contredire un passé »[1].
La fréquentation permanente des cercles dits scientifiques revêt des avantages énormes
et pluridimensionnels pour les élèves débutants et les étudiants-chercheurs
conscients. Nous entendons ici par cercle vraiment scientifique, une entreprise
qui place à l’horizon de ses activités la promotion de la science. C’est en
fait une industrie qui a pour projet la formation de l’esprit scientifique et
pour slogan : un peu de science pour
tous. À partir de ce domaine de définition, nous pouvons dire que ces
cercles occupent une place prépondérante, sinon indispensable dans le processus
de formation d’une carrière épistémologique et professionnelle. Ils se
reconnaissent généralement par une structure architecturale organisée
hiérarchiquement et contenant un capital livresque qui est mis à la disposition
du grand public des lecteurs-chercheurs. Lorsque nous parlons de cercles scientifiques,
il faut également voir un rassemblement d’hommes qui peuvent même provenir
d’horizons divers, mais qui militent pour une cause noble qui s’articule autour
du sacrifice de l’intérêt personnel à l’autel d’une volonté générale dont
l’intérêt final n’est que la promotion de la science. Nous pouvons citer en
occurrence dans notre biotope : le Cercle Philo-Psycho-Socio-Anthropologie
(CPPSA), le Cercle Histoire-Géographie-Archéologie (CHGA), El Casino dans la
filière espagnole, le Centre Culturel Français (CCF), le Centre Catholique
Universitaire (CCU), les clubs de physique, de biochimie, de mathématiques,
etc.
En
effet, l’utilité des cercles scientifiques en question est variée et peut se lire
sur trois plans à savoir : subjectif ou individuel, intersubjectif ou
social et historico-scientifique. Dans ce cadre spécifique, si nous prenons
l’homme dans son individualité, nous affirmerons que les cercles scientifiques
constituent un lieu de formation, d’information, de réformation et de
transformation : un véritable terrain de prédilection pour les amoureux de
la science. Ils participent par leurs formations à la fois intellectuelle,
morale et spirituelle au processus d’humanisation de l’individu de façon
générale et intégrale. La lecture qui représente le plus souvent la clé de
voûte de ces milieux scientifiques est un module d’informations qui nous permettent
de nous actualiser dans le but de pouvoir vibrer sur la même longueur d’ondes
que tous les habitants de notre époque. Friedrich Nietzsche nous recommandait
d’ailleurs, si nous aspirons à la science et à la vérité, de nous perdre dans
la lecture à la manière d’Aristote qui lisait franchement et utilement ;
ce qui fait qu’il était même appelé : « le liseur ». L’information nous renseigne sur l’état des lieux
de notre contexte spatio-temporel et remplit aussi bien souvent un devoir de
mémoire lorsqu’elle nous relate certains évènements du passé. Une telle charge
informationnelle finit parfois par réformer notre vision du monde comme pour
dire respectivement avec les lois des trois états de l’esprit humain d’Auguste
Comte et de Gaston Bachelard qu’elle nous permet de quitter de l’état théologique[2] et concret
à l’état métaphysique et concret-abstrait jusqu’à l’état positif dit celui du nouvel esprit scientifique[3].
En fait, elle transforme nos mentalités dogmatiques d’antan au point où notre
esprit n’est plus statique, et finalement souffre de ne pas changer parce qu’il
sera désormais de sa nature d’être dynamique. En réalité, l’arsenal
méthodologique mis en place par une véritable communauté scientifique vise à
nous affranchir de l’obscurantisme et l’absolutisme qui caractérisent nos
préjugés, nos expériences premières et
nos opinions reçues dans le passé et qui légitiment nos peurs, nos soumissions
lâches et puériles. Ces obstacles
épistémologiques[4]
encombrent notre esprit et c’est par une intégration active d’un cercle
vraiment scientifique que nous pouvons les soumettre à un doute radical à la manière de René Descartes, à une psychanalyse chez Bachelard, à une critique sans complaisance suivant la
méthode de Kant et de Martien Towa pour mieux nous reconstruire l’intellect.
Cette attitude consiste en un véritable procès de curetage accompagné d’un
assainissement mental qui façonne des personnalités scientifiques de l’heure,
caractérisées par l’esprit du dialogue, d’honnêteté, d’ouverture et de
créativité, gage du développement social, économique, politique, scientifique
et humain.
Bien plus, les cercles scientifiques dignes
de ce nom sont des regroupements qui, malgré le fait qu’ils forment
intrinsèquement l’individu, contribuent au progrès de l’activité scientifique
en ce qu’ils ont généralement été un réservoir ou mieux un creuset d’hommes de
sciences qui ont marqué et marquent encore considérablement l’histoire par
leurs pensées, leurs œuvres, leurs découvertes et leurs inventions. L’histoire
nous renseigne fort bien sur l’impact de l’Académie
de Platon d’où est sorti son disciple Aristote qui a fondé à son tour le Lycée, tel qu’il s’entend aujourd’hui ;
les jardins d’Épicure n’ont pas été
en reste. À l’époque moderne, il y a eu une flopée d’écoles et de cercles à
l’instar de l’école de Francfort, celle de Cambridge ou d’Oxford, le fameux
Cercle de Vienne et bien d’autres encore. S’il faut prendre le cas patent de notre
CPPSA qui est d’abord responsable de ma[5]
réussite dans mes études hic et nunc,
nous dirons ensuite qu’il est vieux de 37 ans aujourd’hui. Et, il a déjà un
palmarès non négligeable parce qu’ayant déjà contribué aux cursus des docteurs
tels que : Mme Minkada, M. Leka Essomba, M. Paul Abouna, M. Njoya Mama, M.
Ndzomo Molé, des professeurs et des chefs de départements comme M. Lucien
Ayissi, M. Valentin Nga Ndongo, M. Philippe Tsala Tsala ; des écrivains à
l’instar de Joseph Ngoué, etc. Ce dernier, en plus, fit hériter le CPPSA de
tout son riche patrimoine livresque, d’autres icônes intellectuelles actuelles
s’exercent dans cette même optique et beaucoup d’autres enseignants et grandes
personnalités scientifiques s’y sont abreuvés et s’y ressourcent même encore.
Ces illustrations nous permettent tout simplement de comprendre à ce niveau qu’un
cercle dit scientifique et qui joue véritablement son rôle, est très fondamental
du fait qu’il participe au façonnement de vrais
hommes de science ; ceux qui deviennent utiles à la fois pour leur
communauté scientifique et pour la société à laquelle ils appartiennent. Le
philosophe français René Descartes nous apprenait dans l’un de ses ouvrages qu’ « une Nation est d’autant plus développée que
les hommes y philosophent mieux ». Ainsi, une élite intellectuelle
bien formée est appelée à servir efficacement à l’amélioration des conditions
de vie de son contexte existentiel parce que la philosophie est, selon la définition,
« la saisie de son époque par la pensée…,
l’intelligence du présent »[6].
C’est-à-dire que le scientifique doit produire une pensée qui est fille de son temps. Karl Marx abonde
dans ce sillage quand il ajoute, en le paraphrasant ici que les scientifiques ne
naissent pas de terre comme des champignons mais, ils sont le produit de leur
environnement vital et ont pour mission d’aider à la résolution des problèmes
et des crises spécifiques qui s’y présentent. Il s’agit de comprendre dans cette partie que les permanents du CPPSA,
du CCF, du CCU ou du CHGA d’aujourd’hui sont les docteurs, les enseignants, les
dirigeants et pourquoi pas le président de la république de demain ? Ceci
n’est d’ailleurs possible que si et seulement si l’étudiant-chercheur de
maintenant s’adonne fermement au travail en évitant les chemins de la
félicité illusoire et périlleuse de l’écart
pour emprunter les voies de la rigueur austère et prometteuse de la norme au sens d’Hubert Mono Ndzana.
Bref, la science est la boussole des temps présents et apparaît, dans cette
perspective, comme la lumière qui doit éclairer nos vies et surtout à cette
époque où celle-ci tente déjà de se retourner contre nous à cause du mauvais
usage, que certains congénères véreux et égoïstes, font de ses prouesses et de ses
gadgets.
Pour
finir, nous nous basons sur la devise du CPPSA qui dit que : « servir les autres est une action certaine »,
comme pour retenir qu’un cercle scientifique se veut le lieu où se cultivent
des valeurs humaines et des vertus humanisantes. Ces structures studieuses nous
libèrent des pesanteurs internes qui entravent l’épanouissement total d’un
sujet épistémique. Elles nous garantissent par la même opportunité, un esprit à
la fois scientifique, moral et humaniste imprégné du sens crucial de l’intérêt
général. Nous saisissons ce moment pour suggérer par exemple que notre pays le
Cameroun gagnerait donc à encourager, à promouvoir et à subventionner de telles
initiatives qui seraient la marque d’une prise de conscience profonde de
l’urgence de notre émergence globale à l’horizon 2035. Au moment où nous sommes
en train de terminer cette réflexion, nous devons succinctement retenir avec le
politologue camerounais Alain Fogué que « l’école, c’est le livre ! » et c’est la raison pour
laquelle nous ne pouvons plus que réitérer en conclusion la citation qui sert
de devise à l’AEFALSH[7] :
« nous ne détruirons que par l’école
le mal que les écoles nous ont faits »[8].
OMBOGO MBALA Raphaël, Master 1, Philo., UYI.
[1] La Formation de
l’esprit scientifique. Contribution à une psychanalyse de la connaissance
objective. Chicoutimi au Québec. Édition électronique réalisée le 18 sept. 2002 par Jean Marie Tremblay dans la collection Les
Classiques des sciences sociales, à partir du livre de
Gaston Bachelard (1934), La Formation de l’esprit scientifique. Contribution à une psychanalyse de
la connaissance objective. Paris : Librairie philosophique
J. VRIN, 5e édition, 1967, Collection : Bibliothèque des textes philosophiques,
257 pages. Page 17.
[2] A. Comte, Cours de philosophie positive, in Œuvres choisies, Ed. Aubier, Page 59.
[3] G. Bachelard, La Formation de l’esprit scientifique. Contribution à une
psychanalyse de la connaissance objective. Éd. électronique, Chicoutimi au Québec, 18 sept. 2002, Page 9.
[4] Ibid.,
Page 16.
[5] Il s’agit de l’auteur de ce
texte qui doit la majeure partie de son background estudiantin au CPPSA.
[6] J. D’Hondt, Hegel. Philosophie de l’histoire, textes choisis, Paris, PUF, 1975, Page 10.
[7] Le sigle AEFALSH signifie
l’Association des Étudiants de la Faculté Arts, Lettres et Sciences Humaines.
[8] L. Camara, L’Afrique est bien partie
Mes premiers pas dans l'activité reflexive qui est l'apanage du philosophe.
RépondreSupprimerCe discours est auto-interpellateur en ce qu'il m'invite à m'approcher plus des bons Cercles scientiffiques et des bibliothèques fournies.
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